- Galilaei a écrit:
- La religion et la science sont deux manière différentes d'abborder la compréhension de l'univers. Elle sont toute deux équivalentes au sein de leurs paradigmes respectifs et ne sont donc pas en compétition. Ce sont juste deux points de vue différents de l'univers et ils peuvent se compléter.
Je vous le dis sincèrement : je n'ai pas du tout cette compréhension de ce << non-empiètement des magistères >>, mais alors pas du tout. Le principe de NOMA prône bien le respect mutuel, mais sans empiètement justement quant aux matières traitées. S'il a mis la base morale de l'existence dans le magistère de la religion, chose avec laquelle je ne suis pas d'accord en tant que non croyant, je peux facilement comprendre que
lui et d'autres croyants, se basent là-dessus.
Mais il ne mélange pas la compréhension du monde et la morale.
Je développe et justifie mon opinion un peu plus bas dans mon post, et pardon pour la longueur - mais une discussion partant sur Gould, qui lui-même développait ses idées sur des dizaines ou des centaines de pages, ne peut pas se faire en quelques raccourcis.
- Galilaei a écrit:
- Cependant lorsqu'il concède un role moral à la religion et " the common goal of wisdom" il laisse la porte ouverte à une intreprétation conduisant au concordisme. Et c'est précisement l'interprétation que les religieux en font. Sa position bien que respectable est donc trop "molle" pour qu'un athée le suive.
Il a, selon moi, trop cherché à ménager la chèvre et le chou.
Oui, ici je vois à peu près ce que vous voulez dire. Je ne suis pas en désaccord profond avec vous sur ce point, mais je suis athée aussi et je ne suivrai a priori personne, ni Gould ni Dawkins, ni qui que ce soit. Par conséquent je n'ai pas plus de nécessité non plus qu'on me dise ce qu'un athée devrait suivre ou ne pas suivre.
Dites-moi si je ne m'abuse, mais à vous lire on dirait que vous "accusez" Gould de complicité dans << le concordisme >> ? C'est assez injuste et peu raisonné. L'envie de concordisme le précède et continuera après sa mort, elle est me semble--t-il endémique à +/- chaque croyant. Ca lui traversera sans doute l'esprit au moins une fois dans sa vie.
Le concordisme je le réduis à son sens strict, relié à une lecture des textes religieux afin qu'ils "
ne soient pas contradictoires avec les connaissances scientifiques". Partant de là, je ne vois pas vraiment ce que l'éthique vient faire dans le concordisme. Il parle de but ou objectif de sagesse (wisdom) et non pas de connaissances (knowledge) dans son texte ("common goal of wisdom"). Bah, s'il accorde de la sagesse à tous ces gens réunis, pourquoi pas ? M'en fous en fait. Cette sagesse selon lui est liée au respect. Bah, chacun son truc. Personnellement, le respect et la sagesse sont deux notions qui m'indiffèrent et me font hausser les épaules. Mais de là à y voir une porte ouverte au concordisme, ce n'est pas raisonnable, et il n'est pas non plus responsable des interprétations diverses, de part et d'autre, de son discours.
Il faut bien comprendre que Gould ne s'est pas vraiment mêlé de "lutte ouverte militante" ni de fermes discussions "évolution versus création", même si bien entendu le créationnisme le faisait sourire ou l'irritait - selon les jours -, normal pour un paléontologue. Comme nous tous. Pour lui, le créationnisme était cause entendue : ni une science ni un objet digne de considération scientifique. Les arguments
ad vitam eternam contre les créationnistes, ce n'était tout simplement pas son truc - bien qu'il ait par la force des choses participé à des débats. Son dada était avant tout l'évolution et les discussions sur les détails des processus et agents de l'évolution. Un discours inter-"évolutionnistes". Il n'était d'ailleurs pas un athée en guerre militante contre les religions - même pas athée du tout -, et c'est son droit aussi. Il n'a jamais été militant contre les religions comme on peut le supposer de certaines personnes dans ce site. C'est aussi sa liberté en tant que paléontologue +/- croyant (difficile à dire...) et +/- bon copain de tout le monde. La paix civique était peu ou prou sa mentalité. Un pacifiste séculier en quelque sorte. Vous pouvez lui reprocher de ne pas être comme vous ou Dawkins, c'est votre droit, mais c'est sa liberté et son choix.
Pour ce qui me concerne, du moment qu'il n'a pas mêlé ses croyances aux sciences, et qu'il a même trouvé et promu une voie de secours intellectuellement confortable pour lui-même et d'autres croyants, je n'ai rien à redire à son NOMA dont pas mal de gens ont malmené la portée et l'intention.
Si en plus il donne une certaine caution morale aux religions, ce qu'il propose sous une forme bien moins catégorique et bien plus nuancée que cela, et bien ça le regarde aussi et ne me concerne pas; même si je ne partage pas sa sensibilité ici.
Tout ce qui m'intéresse chez Gould est la partie scientifique, et dans ce topic il me semble que le sujet n'est pas la NOMA...
Vous savez, certaines personnes sont avant tout des laïques, c'est mon cas et semble-t-il Gould était de sensibilité profondément laïque-séculaire, et ne sont pas nécessairement en guéguerre simpliste et réactionnaire contre les croyants ou "La croyance" au singulier (singulier ce qui n'a guère de sens), tout en reconnaissant que les religions ont un passif et présent lourdement chargé entre autres de criminogénie.
Promouvoir la raison et la libre pensée est une cause qui m'a toujours plu, mais très vite on s'aperçoit que le raisonnement logique a bien peu de portée contre les croyances. C'est une caractéristique peut-être neurologique de la croyance religieuse ou pas que je ne m'explique pas, qui est étonnante car très invasive chez l'humain, mais que l'on constate tous. Bien des gens ont un esprit parfaitement logique et cohérent en toute chose, et bizarrement ils adhèrent à des croyances bêtes à fouetter. Un phénomène assez étonnant.
Dit autrement, même si je milite ailleurs pour certaines choses, j'ai encore la capacité de ne pas mélanger le créationnisme et ces histoires de religions ou de guéguerre contre les croyances dans toute discussion sur l'évolution ou environnement de l'évolution. Ce n'est pas bien utile à mon avis. Et c'est aussi un peu cela que je comprends par
"ne pas mélanger les différents magistères". Tout cela ne signifie pas que sciences et croyances aient quelque chose à faire ensemble concernant la compréhension du monde. Gould n'a jamais prétendu cela, mais bien le contraire = séparation. Quant à l'éthique, ce n'est pas une compréhension du monde mais avant tout un ensemble de choix et de décisions, d'idéations inspirées entre autres de progrès social et pourquoi pas de réflexions civiques-philosophiques. Et vu ainsi, en effet, pour ce qui concerne l'éthique, les sciences n'ont rien à y faire non plus. Pas plus que les religions.
C'est plutôt cela que Gould - à mon humble avis - a voulu relever dans ses rares textes sur le sujet, par un effet de réciprocité en clin-d'oeil. Il a d'ailleurs souvent insisté là-dessus sur d'autres articles : pas plus les religions n'ont à se mêler de sciences que les sciences d'éthique. Sous-entendu - mais parfois clairement explicité -, que ni les sciences ni les religions n'ont à se mêler d'autre chose que de leur champ de compétences. L'éthique personnelle n'en faisant pas partie, ni de l'une ni de l'autre.
Néanmoins la nuance que, pour Gould, si les croyants désirent régler leur sens moral sur leurs religions, ce qu'il faisait lui-même d'une certaine manière vu que de culture et tradition familiale juive, ça les regarde pour autant que cette éthique n'empiète pas sur les droits et libertés communs à tous les citoyens. On retombe ici encore sur une extrapolation de la NOMA, qui ici dépasse le cadre des sciences et rejoint le principe de laïcité. Principe lui-même issu, en quelque sorte, d'un antécédent de séparation des pouvoirs. Une notion sans doute mieux assimilée aux USA que la
laïcité à la française.
Pour conclure et pour ce qui me concerne au sujet des sciences,
ne pas combiner foi et sciences dans un même discours est une excellente chose (c'est finalement ça les deux magistères séparés de Gould, peu importe qu'il accorde une certaine caution morale aux religions, ça le regarde). Très franchement, la lubie de voir un jour disparaître les croyances absurdes de ce monde, je n'y ai jamais cru. Je suis pathologiquement non croyant.
Et puis la liberté de conscience et de foi et culte, vaut mieux l'accorder à chacun. Cette idée laïque du << vivre ensemble >>, vous pouvez l'appeler ménager chèvre et chou si vous y tenez, mais elle vaut mieux à mon sens que de risquer se voir un jour privé de notre liberté de conscience, de non croyance et de non culte. Un droit réciproque garantit le nôtre par ce principe de réciprocité et d'égalité.
La laïcité et tous ses produits dérivés, dont la NOMA fait partie à mes yeux, sont un excellent principe du vivre ensemble. Cela peut se discutailler à perpet bien entendu, mais il vaut mieux sur un autre topic il me semble. C'est peut-être mieux de segmenter les différents sujets de discussion.